mardi 22 mai 2012

Ann Harrison, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International


16 mai 2012

Malgré l'accord concernant les détenus palestiniens, Israël doit rendre des comptes pour les violations commises en prison

À Gaza, les proches de détenus palestiniens incarcérés dans des prisons israéliennes célèbrent l'accord conclu.
À Gaza, les proches de détenus palestiniens incarcérés dans des prisons israéliennes célèbrent l'accord conclu.
© AHMUD HAMS/AFP/GettyImages
Nous espérons que ces engagements découlent d'une nouvelle stratégie israélienne fondée sur le respect des droits fondamentaux des détenus.
Ann Harrison, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International
Deux mille Palestiniens incarcérés dans des prisons israéliennes ont suspendu leur grève de la faim, entamée il y a un mois, après qu'Israël ait approuvé plusieurs mesures visant à améliorer les conditions de détention – décision considérée par Amnesty International comme une avancée sur le terrain du respect, par Israël, de ses obligations en matière de droits humains.

En vertu d'un accord négocié par l'Égypte, Israël a accepté, entre autres, de mettre fin à la détention à l'isolement de 19 prisonniers – maintenus à l'isolement depuis 10 ans pour certains – et de lever l'interdiction relative aux visites de leur famille pour les prisonniers originaires de la bande de Gaza.

« Nous espérons que ces engagements découlent d'une nouvelle stratégie israélienne fondée sur le respect des droits fondamentaux des détenus », a indiqué Ann Harrison, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International.

« Il n'est cependant pas normal que 2 000 prisonniers et détenus aient dû mettre leur santé en danger afin d'appeler au respect de leurs droits fondamentaux, que les autorités israéliennes bafouent depuis des années. »

Amnesty International demande régulièrement la reprise des visites de proches pour les prisonniers venant de Gaza, totalement suspendues depuis juin 2007.

« Les violations à répétition commises par les Services pénitentiaires israéliens contre les détenus observant une grève de la faim doivent donner lieu à une enquête exhaustive, indépendante et impartiale, et les responsables doivent être amenés à rendre des comptes », a poursuivi Ann Harrison.

« Les placements à l'isolement pour des durées aussi prolongées – décidés sur la base d'informations qui ne sont communiquées ni aux prisonniers ni à leurs avocats – constituent une violation du droit de ceux-ci à une procédure régulière, ainsi qu'un traitement cruel, inhumain et dégradant. »

Aux termes de l'accord, il est prévu que ces prisonniers soient transférés d'ici la fin de la semaine dans des cellules où ils seront en contact avec d'autres détenus.

« Les personnes observant une grève de la faim depuis six à 11 semaines qui se trouvent au centre de soins de la prison de Ramleh doivent être transférées vers un hôpital civil immédiatement, jusqu'à ce qu'elles soient hors de danger. Elles doivent en outre être traitées avec dignité », a ajouté Ann Harrison.

La détention administrative est une procédure aux termes de laquelle des individus sont incarcérés sans inculpation ni jugement en vertu d'un ordre militaire pendant des périodes pouvant aller jusqu'à six mois, renouvelables indéfiniment. S'appuyant sur une règlementation adoptée à l'origine sous le mandat britannique, Israël utilise cette mesure contre ses citoyens depuis 1948, et depuis 1967 contre des milliers de Palestiniens des territoires occupés.

Les ordres de détention administrative s'appuient sur des informations secrètes qui ne sont pas révélées aux détenus ni à leurs avocats, ce qui prive les détenus de la possibilité d'exercer leur droit à engager une action en justice.

À la fin avril 2012, quelque 308 Palestiniens se trouvaient en détention administrative selon les statistiques des services carcéraux israéliens. Certains sont des prisonniers d'opinion, incarcérés uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d'expression, d'association ou de réunion.

Depuis de nombreuses années, Amnesty International exhorte Israël à mettre fin à cette pratique et à relâcher les personnes placées en détention administrative, à moins qu'elles ne soient inculpées d'une infraction prévue par la loi et jugées conformément aux normes internationales dans les meilleurs délais.

« La promesse, semble-t-il faite par Israël, d'honorer l'accord l'engageant à ne pas renouveler les ordres de détention émis contre les personnes actuellement en détention administrative, à moins que de nouveaux renseignements cruciaux ne soient présentés, ne suit pas ces recommandations mais constituerait – si elle est tenue – un premier pas vers le respect de ses obligations internationales sur le plan des droits humains », a expliqué Ann Harrison.

Amnesty International et des organisations locales de défense des droits humains ont recueilli des informations sur des violations répétées commises par les Services pénitentiaires israéliens contre les détenus observant une grève de la faim depuis que Khader Adnan, placé en détention administrative, a entamé son jeun en décembre 2011.

Parmi ces abus figurent : le fait de punir les grévistes de la faim en les plaçant à l'isolement et en les sanctionnant financièrement ; les privations de soins médicaux urgents ; le manque d'accès à des médecins et avocats indépendants ; l'interdiction de recevoir la visite de proches ; des agressions physiques ; et les soins administrés de force contre le gré des détenus, notamment des injections.

Amnesty International déplore par ailleurs que les forces armées et la police israéliennes aient semble-t-il recouru ces dernières semaines à une force excessive contre des manifestants non violents défilant en signe de solidarité avec les détenus grévistes de la faim, que ce soit en Cisjordanie ou en Israël.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire